Faut-il réduire les quantités de déchets que l’on produit chaque jour ? La réponse peut paraître évidente à première vue. Pourtant, c’est une question qu’on ne se pose pas forcément, dès lors que l’on jette nos déchets dans la bonne poubelle et qu’on suit les consignes locales de tri sélectif. On se dit que nos déchets seront forcément recyclés ou incinérés, mais que dans les deux cas, ils ne poseront aucun problème environnemental.
Mais est-ce vraiment le cas ? À quel point nos déchets sont-ils réellement recyclés ? Et est-il suffisant de trier nos déchets ? Quelques éléments de réponses dans cet article !
Qu’y a-t-il dans nos poubelles ?
Quelques chiffres pour commencer ! D’après un récent rapport de la Cour des Comptes, un Français génèrerait annuellement près de 582 kg de déchets ménagers et assimilés (DMA) en moyenne.
Si on regarde d’un peu plus près ces 582 kg, on constate qu’on en trie un peu plus de la moitié (tri sélectif ou dépôt en déchetterie). L’autre moitié, 249 kg pour être précis, correspond à tout ce que l’on met dans nos poubelles de déchets non-recyclables, et qui devient alors des « ordures ménagères résiduelles » (OMR).
Source : Schéma « les dépenses du service public des déchets » – Rapport 2023 de la Cour des Comptes sur les déchets ménagers
Dans ce schéma, un chiffre en particulier a retenu notre attention : sur l’ensemble de nos déchets ménagers (les 582 kg par personne et par an), seuls 44% sont envoyés en centres de tri pour y être valorisés, recyclés, ou compostés. Oui, encore aujourd’hui, plus de la moitié de nos déchets ménagers sont incinérés ou enfouis dans les sols !!
Les limites du recyclage
Les taux de recyclage de nos emballages
On nous laisse souvent miroiter que le recyclage est une solution miracle et écologique qui nous permet ne rien changer à nos habitudes, si ce n’est de bien penser à trier nos déchets. On peut donc continuer à surconsommer, à acheter des produits suremballés, et à générer des déchets sans limites ! Et oui, de toute façon tout sera recyclé et réutilisé !! Bon, mais alors c’est vraiment vrai tout ça ?
Si la filière du recyclage s’est effectivement bien développée en France ces dernières années, on n’arrive pas encore à tout recycler. On le constate à travers les taux de recyclage des différents matériaux collectés dans nos bacs de tri sélectif :
Source : Source Citeo. Droits de reproduction réservés et strictement limités – https://www.citeo.com/le-mag/les-chiffres-du-recyclage-en-france
Tout d’abord, il faut le souligner, il y a quand même de très bonnes nouvelles quand on regarde ce graphique ! Les taux de recyclage de nos emballages en acier et en verre sont élevés. Celui du papier et du carton est intéressant aussi, en dehors des briques en carton pour lesquelles il y a encore quelques difficultés. Pour le plastique en revanche, c’est une autre histoire. Mais alors comment expliquer cet écart de taux de recyclage entre le plastique et les autres matériaux ?
Vous le savez probablement, il existe plusieurs types de plastiques très différents les uns des autres. Et tous ne sont pas systématiquement acceptés en centres de tri ! Le polystyrène expansé (PSE) par exemple, utilisé pour faire des barquettes de viande, des boîtes, des couverts jetables, des stylos, …) est encore très peu recyclé. A l’inverse, le polyéthylène téréphtalate (PET), principalement utilisé pour faire des bouteilles en plastique, est de mieux en mieux pris en charge.
Tout serait beaucoup plus simple si on pouvait recycler tous les plastiques de la même façon, on est bien d’accord ! Seulement, on ne recycle pas un pot de yaourt comme on recycle une coque de smartphone ou un tableau de bord de voiture !
Pertes et limites physiques du recyclage
Une autre chose est à prendre en compte : les pertes lors du recyclage. Cela ne concerne pas l’acier et le verre, qui sont recyclables à 100% et à l’infini (sauf cas particuliers). Pour le plastique, le papier et le carton en revanche, il y a des pertes.
À savoir qu’une bouteille en plastique recyclé ou une feuille en papier recyclé ne contiennent jamais 100% de matériau réutilisé. Il reste toujours nécessaire d’ajouter un certain pourcentage de matière neuve pour pouvoir remettre le matériau recyclé dans le circuit. Vous pouvez connaître la proportion de matière recyclée dans vos emballages grâce à ce symbole :
Évidemment, le pourcentage indiqué à l’intérieur du symbole varie selon la proportion de matière recyclée contenue dans chaque emballage.
Et puis le plastique ne se recycle que 2 à 3 fois maximum, après quoi il devient inutilisable. Même logique pour le papier (recyclable une dizaine de fois) et le carton (jusqu’à 8 fois), dont les fibres s’usent avec les recyclages successifs.
Donc recyclables ou pas, tous les emballages en plastique, papier ou carton finissent tôt ou tard par devenir des ordures ménagères ! Si vous devez absolument acheter un produit emballé, on vous recommande fortement les emballages en verre ou en acier. Ça pèse un peu plus lourd, on sait ! Mais tous les médecins recommandent un exercice physique quotidien, et le simple fait de faire vos courses peut y contribuer, sans non plus vous demander un effort surhumain. N’est-ce pas magnifique ? 😉
Générer moins de déchets vaut mieux que recycler
Petite précision avant que ce titre soit mal interprété. Bien sûr qu’il faut trier nos emballages, et bien sûr qu’on espère qu’ils soient correctement recyclés en bout de chaîne. C’est évidemment bien mieux que de jeter nos déchets dans la nature.
Pour autant, on peut encore faire beaucoup plus que ça, et éliminer progressivement les emballages de nos poubelles. Trier et recycler ses produits et ses emballages c’est bien, mais générer moins de déchets, c’est encore beaucoup mieux !
Les arguments en ce sens sont nombreux. Voici une petite liste non exhaustive de bonnes raisons de chercher à générer moins de déchets :
- L’argument environnemental : un déchet qu’on ne produit pas, c’est un déchet de moins qui risque de se perdre dans la nature ou de finir enterré dans les sols. Oui, les déchets enterrés polluent les sols et font courir le risque d’une contamination des nappes phréatiques. En se décomposant dans les sols, les déchets génèrent du méthane, un puissant gaz à effet de serre qui participe ensuite au réchauffement climatique.
- L’argument sanitaire : on a parlé des nappes phréatiques, qui risquent d’être contaminées indirectement par les déchets enterrés. Mais les incinérateurs, eux non plus, ne sont pas la solution miracle pour faire disparaître nos déchets. Même si la chaleur qu’ils dégagent peut être récupérée pour chauffer des logements aux alentours ou pour générer de l’électricité (ce qui est génial !), les fumées qu’ils dégagent contiennent de nombreux polluants dont l’inhalation est globalement assez peu recommandée par le corps médical !
- L’argument énergétique : recycler nos produits et nos emballages est très énergivore, notamment pour la refonte des produits. Et toute cette énergie, il faut la produire … L’ensemble du processus de recyclage n’est donc pas neutre en carbone, loin de là !
- L’argument financier : Toujours selon la Cour des Comptes, les dépenses publiques de collecte et de traitement des déchets ménagers s’élèveraient en France à près de 10,9 milliards d’euros par an. Produire des déchets a un coût, et on le paie au prix fort à travers nos impôts ! Partant de là, le calcul est simple : moins de déchets produits au niveau national, c’est moins d’impôts à payer pour leur collecte et leur traitement ! 😊
Vous l’avez compris, le meilleur déchet est celui que l’on ne produit pas ! Trier et recycler ses déchets est essentiel, il n’y a pas de débat là dessus. Cependant, on ne devrait le faire qu’en dernier recours, quand on n’a pas pu réparer, revaloriser, revendre, donner, ou réutiliser un produit ou un emballage.
On espère vous avoir convaincus de la nécessité de réduire les quantités de déchets que l’on produit chaque jour ! Pour aller plus loin, vous retrouverez dans notre prochain sujet une petite introduction à la démarche zéro déchets, une approche qui vise justement à repenser nos modes de consommation pour générer toujours moins de déchets !
Publication : novembre 2023.